Video: Giardino Botanico

La Déesse de la Terre représente un puissant esprit de la nature, auquel est confiée la protection du château de Taggenbrunn avec ses vignobles et tous ses visiteurs. La sculpture élaborée de 12 mètres de haut a été conçue par André Heller et utilise des plantes, des cristaux de roche, du métal, la lumière et l’eau comme éléments de création. Elle a été commandée par l’entreprise d’horlogerie Jacques Lemans selon le désir d’Andrea et Alfred Riedl.

Une collection des œuvres d’André Heller dans un montage vidéo, accompagnée des paroles du fameux écrivain allemand maintes fois distingué Hans Magnus Enzensberger.

À Gardone Riviera, bien des choses évoquent des espaces et des paysages des films de Luchino Visconti. Ce sont des aperçus et des réminiscences d’un temps jadis où les dames portaient encore des chapeaux raffinés avec voilette, et où les soubrettes leur tendaient dans leur cabinet de toilette des gants de satin tirés d’armoires fleurant la lavande. Une espèce d’enchantement règne sur la ville, une lenteur et une torpeur, comme si le temps n’avait pas prise sur ce premier véritable coin du sud qui accueille le voyageur arrivant de Riva par les innombrables tunnels de la Gardesana Occidentale. Il y a une promenade dont les fondations ont été construites dans le lac. Elle est peuplée de grands lauriers-roses et d’orangers. On y trouve des cafés avec salons de billard. Qui flâne le long de la rive aperçoit au loin se dresser, comme dernière affirmation des Alpes, le Monte Baldo souvent recouvert de neige jusqu’au mois de mai, et à assez petite distance dans le jeu des vagues cette île allongée aux cyprès que Saint François avait choisie pour refuge au début de son chemin.

Gardone Riviera se compose de deux parties : le groupe de maisons au bord de l’eau, et un second sur le doux versant près de l’église. Les gens du cru les appellent effectivement la ville d’en bas et la ville d’en haut. L’élégance réside en bas :
le Grand Hôtel auquel Stefan Zweig a conféré avec sa nouvelle « Naufrage d’un cœur » un lien avec l’éternité littéraire, le cocktail-bar où Winston Churchill se reposait après la peinture, l’Hôtel Savoy qui proposait tous les soirs, vers 1900, un bal avec grand orchestre aux curistes de la noblesse russe, suédoise ou d’autres zones de froidure. La ville d’en haut est plus rustique, en sait plus long sur les olives et la grappa sèche, et l’on voit parfois encore des femmes pieuses en prière défiler dans le dédale des ruelles avec une statue de la Vierge. Leurs aïeux ont peut-être travaillé comme valets de ferme pour le chatoyant monstre Gabriele d’Annunzio, dont la somptueuse résidence, s’étendant sur neuf hectares et adossée à Gardone, affiche une démesure luxueuse glorifiant les sacrifices de la guerre et du sang qui n’était pas sans raison chère à Mussolini et qui me répugne.

La ville d’en bas et la ville d’en haut sont reliées par un espace d’épanouissement sensoriel et de force magique : le Giardino Botanico. C’est une collection de la flore des régions du monde, entrelaçant l’Afrique et l’Amérique du sud, l’Asie, l’Europe et l’Australie. Des edelweiss au cœur de prairies d’orchidées, des fougères arborescentes de plusieurs mètres à côté de prodigieux grenadiers. Des ruisseaux et des cascades, des étangs avec des koïs sacrés, des truites et le reflet du vol des libellules, des talus en dolomite à côté de cactus et de tours de lierre. Des sculptures indiennes et marocaines en harmonie avec des installations de Roy Lichtenstein, Susanne Schmögner, Mimmo Paladino et Keith Haring. J’appartiens à ce paradis depuis 1988 et cela ne cesse de m’étonner et de me ravir. Le dentiste du dernier tsar, le Dr Arthuro Hruska, fut le fondateur de ce bonheur où se trouve également une villa vénitienne qui est devenue mon bienheureux domicile. Lorsque je laisse planer depuis l’un des balcons mon regard sur la splendeur du lac de Garde ou l’un de mes bosquets de bambous, j’ai toujours encore peine à croire que ce parc a bien voulu de moi comme gardien et comme allié, et je l’en remercie aussi bien que je le peux, avec amour.

André Heller

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Garden, Spaces